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| Autour de la littérature orale japonaise | |
| | | Littérature orale du Japon. | |
| Ce texte est un texte déjà très ancien (avant 1888) dont le contenu témoigne d'un ethnocentrisme encore très vivace et des grandes ambitions coloniales de la France. Nous le publions malgré tout dans sa globalité vous faisant confiance pour séparer le grain de l'ivraie. Le Fantastique japonais.Jadis des guerres civiles ont ensanglanté le Japon ; ce coin de terre, si merveilleusement favorisé par la nature, est encore aujourd'hui visité par de terribles fléaux : les orages d'une violence inouïe, les cyclones, les inondations, les tremblements de terre même, ne sont pas rares et à ces redoutables phénomènes naturels viennent s'ajouter les incendies qui détruisent des villes entières; leur fréquence et leur intensité sont dues surtout au mode de construction des maisons faites de bois et en papier, - la pierre n'y entrant qu'en très faible quantité et seulement comme assises. On a calculé que ces maisons ne peuvent durer en moyenne plus de dix ans. Ces diverses causes expliquent, ce mélange curieux d'insouciance et de naïves superstitions qui est si remarquable chez le peuple, et qui se complique, chez les gens bien élevés, du plus aimable des septiques. Ajoutons que la tolérance, cette vertu si rare, est pratiquée au Japon mieux que partout ailleurs.
Artistes jusqu'au bout des ongles, sensibles par dessus tout au charme de la nature, les Japonais se laissent vivre, peu soucieux de la logique, et des idées les plus contradictoires sont accueillies par eux sans le moindre effort.
C'est ainsi qu' Anida et Zizo, dieux tutélaires, sont l'objet de la même vénération que Foudo Sama, grand justicier et pourvoyeur des enfers. Le Mayoké, démon sans importance, dont vous trouverez une représentation ci-contre semble avoir été exécuté à l'aide d'un procédé analogue à celui qu'emploient nos emballeurs pour marquer leurs caisses; c'est le spécimen le plus grossier de l'imagerie japonaise que nous ayons rencontré dans nos courses à travers le pays.
Tracé à l'encre sur une petite planchette, nous l'avons toujours vu occuper, au-dessus de la porte des chaumières, la place que nos paysans réservent à la Vierge et aux saints.
Mais rien ne saurait donner une idée plus nette de l'état d'esprit particulier des Japonais, que cette préface d'un ouvrage du peintre Toyo-Foussa, où sont représentés, sous les aspects les plus variés, les démons du cru, les génies inoffensifs ou malfaisants de la terre et du ciel, de l'eau du feu, de la forêt, etc.
" J'avoue, dit l'auteur, que mes yeux n'ont jamais vu en pleine lumière les démons que je représente et que mes oreilles n'ont pas entendu leurs cris - cela tient sans doute à ce qu'ils ne se montrent que la nuit; mais j'ai recueilli les traditions conservées dans les familles, je me suis inspiré de l'œuvre des peintres anciens, et plusieurs de ces monstres, bien faits pour inspirer l'effroi, me sont apparus en rêve. Le sujet m'est familier; cependant ce n'est pas sans de vives appréhensions que je me suis décidé à le traiter de nouveau. Tout le monde sait ce qui advint au vieux peintre chinois qui fut dévoré par le dragon dont il avait reproduit les traits affreux. Aussi, c'est à grand'peine que les encouragements de mes amis et les instances de mon éditeur sont venus à bout de ma timidité. Et maintenant advienne que pourra et que le diable m'emporte... S'il existe."
Les petits tableaux qui vont suivre, ayant trait aux choses qui se passent dans la maison, sont empruntés à l'œuvre de Toyp-Foussa. Ils sont traduits librement, non en fac similé mais seulement de façon à bien faire saisir le caractère des sujets choisis Aux personnages fantastiques cités plus haut, dont nous donnerons quelques échantillons curieux, viendra s'ajouter la série des femmes bizarres, des spectres et des apparitions, des légendes religieuses Bouddhiques, des méfaits et des facéties du renard, si populaire au Japon.
L'iconographie japonaise est d'une richesse inouïe en cette matière, et les artistes qui l'ont traitée et que nous mettrons à contribution sont innombrables.
I). Les génies de la Maison
Dans tout ce qu'il a touché, l'artisan japonais - aussi bien que l'artiste a atteint la perfection.
Charpentiers et menuisiers, ayant à leur disposition des bois excellents - il en existe plus de cinquante variétés pouvant être utilisées dans la construction - ont obtenu de superbes résultats. Artistes eux-même, ils ne se sont pas contentés des assemblages savants, des profils délicats que nous connaissons, ils ont su aussi tirer parti des bois bruts ou à peine dégrossis, qu'ils ont appliqués à la décoration intérieure. Ici, PL.II c'est un léger tronc d'arbre débarrassé de son écorce, servant de pilastre. On a tourné la cime du côté du sol, sans tenir compte du sens de la sève. Alors les petits génies qu'elle contient, gêné de se sentir ainsi la tête en bas, ont pris la fuite, et bientôt l'arbre abandonné tombera en poussière .
A SUIVRE
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Répertoire de contes japonais. CONTES DU VIEUX JAPON
I- HANASAKI-JIJI (Le vieillard qui fait fleurir les arbres morts ).
Autrefois, dans les temps anciens, vivait un heureux couple, déjà vieux, et dont l'unique consolation était un petit chien tout mignon.
Un jour, ces veilles gens s'avisèrent de creuser la terre à un endroit où leur chien avait gratté, et ils y trouvèrent une grande quantité d'or. A côté d'eux vivaient deux méchantes gens, qui apprenant la bonne fortune de leurs voisins voulurent avoir le même profit et demandèrent leur chien. Il l'obtinrent ; mais le chien ne voulait pas du tout gratter; alors ils le forcèrent, et quand ils eurent bien creusé, ils ne trouvèrent que de mauvaises choses. Il entrèrent dans une grande colère et tuèrent le chien; puis ils l’enterrèrent au pied d'un petit sapin, sur le bord de la route.
Le sapin se mit à pousser si vite que le bon vieillard put l'abattre peu après pour en faire un mortier à riz. Quand il y mettait de l'orge pour le piler, ou toute autre graine, la graine sortait du mortier en grande profusion, et lui rendait bien plu qu'il n'avait mis. Le méchant vieillard, alors encore envieux et jaloux, demanda à son voisin de lui prêter son mortier. Mais quand il s'en servit, le mortier tomba en morceaux mangé par les vers. Il le jeta alors au feu et le brûla.
Le bon vieillard prit des cendres de son mortier, et s’aperçut qu'en les répandant sur les arbres morts, ceux-ci fleurissaient. Le prince de la contrée, apprenant cela, fit venir le vieillard et lui donna de l'or, de l'argent et des pièces de soie en grande quantité. Il ne fut plus connu que sous le nom du " Vieillard qui fait fleurir les arbres morts"
Le voisin, cette fois encore, voulut faire l'épreuve, et essayer de faire pousser des fleurs sur les arbres desséchés, avec la cendre du mortier brûle. Mais quand il en prit une pincée et la répandit devant le prince, loin de voir pousser des fleurs, le prince reçut toute la cendre dans les yeux, et fit rouer de coups par ses hommes le méchant vieillard, qui s'échappa à grand-peine, la tête fracassé, et tout couvert de sang.
Sa femme l'attendait avec impatience, et le voyant venir de loin, pensa :
- Mon mari aussi a été récompensé, car je le vois revenir avec des vêtements de pourpre.
Mais tandis qu'elle se réjouissait, son mari approchait, et à la fin elle s’aperçut que les vêtements de pourpre n'étaient que de sang. Le méchant vieillard se mit au lit et il y mourut en peu de temps.
Contes du vieux Japon, traduits par J.Dautremer. Collection illustrée de petits volume japonais, éditée par Kobounsia, 2, Minami Sayéguitsio, à Tokyo. IN revue. La tradition de 1887 N°1 page.8
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II- Shitakri-Suzume
(Le moineau qui a la langue coupée)
Il était une fois une veilles femme très méchante. Elle avait un jour mis de l'amidon dans un vase pour y laver ensuite ses vêtements. Mais un moineau qui était le favori d'une voisine mangea tout l'amidon. Voyant cela, la méchante femme prit le moineau, et l'injuriant et l'appelant être détestable ! elle lui coupa la langue.
Quand la femme à qui appartenait le moineau sut ce qui était arrivé, elle fut vivement chagrinée, et se mit en route avec son mari pour savoir où le moineau s'était sauvé. Après avoir beaucoup marché dans les montagnes et dans les plaines, ils finirent par trouver sa maison. Quand le moineau vit ses maîtres et apprit qu'ils avaient fait tant de chemin pour venir jusque chez lui, il se réjouit beaucoup. Il les remercia de leur bonté pour lui, fit apporter une table chargé de poisson et de thé, tellement qu'on n'y pouvait plus rien poser. Tous les enfants et petits enfants du moineau servirent à table et à la fin du repas, le maître de la maison jetant au loin sa tasse de saké, se mit à danser ce qu'on appelle la Danse du moineau, et ainsi toute la journée se passa à festoyer.
Quand la nuit vint et que les deux vieillards voulurent se disposer à partir, le moineau fit apporter deux grands paniers et leur dit :
- Prenez, je vous prie un de ces paniers; lequel voulez-vous emporter? Le plus grand ou le plus petit ?
- Donnez-nous, répondirent-ils, le plus léger; car nous sommes vieux et c sera plus facile à porter
Ils prirent donc le panier léger et retournèrent ainsi chez eux. Lorsqu’ils furent arrivées, ils voulurent voir ce qu'il y avait dans le panier et l'ouvrirent. Quel fut leur étonnement quand ils s'aperçurent qu'il était plein d'or et d'argent, de pierres précieuses et de rouleaux de soie. Jamais ils ne se seraient attendus à de telle richesses ! Et, plus il en sortait, plus il y en avait ; le panier était inépuisable, de sorte qu'ils devinrent de suite riches et fortunés.
Quand la méchante femme apprit cela, elle fut prise de jalousie et voulut avoir les mêmes trésors; elle alla donc trouver sa voisine et lui demanda où le moineau vivait, et le chemin à faire pour aller chez lui. "J'irai " se dit-elle ! et elle partit en effet.
Le moineau, dés qu'il la vit venir, fit immédiatement apporter deux paniers exactement semblables aux autres et lui fit la même question qu'aux deux vieillards:
-Voulez-vous le plus lourd ou le plus léger ?
-Donnez-moi le plus lourd "répondit-elle.
Elle prit donc le panier et s'en retourna chez elle très chargée; car c’était lourd comme de la pierre et fort difficile à porter. Enfin elle parvint à sa maison.
Mais quand elle ouvrit le panier, il en sortit une quantité de petits diables qui se jetèrent sur elle et la mirent en Pièces.
Contes du vieux Japon, traduits par J.Dautremer. Collection illustrée de petits volume japonais, éditée par Kobounsia, 2, Minami Sayégichï, à Tokyo. IN revue. La tradition de 1887 N°5
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