Mercredi 8 décembre 2010
à 18h30 à la médiathèque Alphonse-Daudet (Alès, 30)
"La fille aux mains coupées : au carrefour de l'oralité et de la littérature"
Depuis toujours, les récits de la tradition orale et la littérature écrite se nourrissent mutuellement. Ce conte en est l'illustration. Au cours de cette conférence, nous enquêterons sur cette réciprocité et questionnerons également la relation entre l'homme et la littérature, orale notamment.
Matériaux de préparation.
Ce conte, répandu dans toute l'Europe, est connu également dans le Proche-Orient, et dans certaines régions de l'Afrique et des deux Amériques. Le thème a fait en Europe, l'objet de nombreuses adaptations littéraires depuis le XII° siècle(1).
Des 18 vers littéraires de ce thème qu'analyse Hèrmann Suchier(2) nous n'en mentionnerons ici que deux; d'abord le roman en vers de la "Belle Hélène de Constantinopl, au XIII° siècle "dont une mise en prose, imprimée comme livre populaire, eut une vogue immense dans la littérature orale populaire de toute l'Europe" (3). On sait en effet que ce récit - tout comme celui, au thème voisin, de "Geneviève de Brabant" ... à fait partie de la littérature de colportage.
L'oeuvre poétique picarde. La Manekine. due, au XIII° siècle, à Philippe de Rémi, sire de Beaumanoir, dramatisée et mise en prose par la suite, offre avec les traditions orales de nombreux points de contact. Elle est en particulier la seule version, littérature du thème à connaître le miracle des bras recréés en les trempant dans l'eau d'une fontaine, trait fréquent dans nos versions modernes. A la question si celles-ci "ne sont pas de simples échos du vieux roman" Suchier cependant est d'avis qu'il faut répondre négativement, encore que l'influence des textes littéraires ne puisse être niée. (4)
Les deux textes cités - ainsi que d'autres attestations écrites de notre thème - débutent par le motif du père désirant épouser sa propre fille. Les épisodes introductifs des versions orales françaises sont autres. On remarquera précisément, face à la diversité de ces épisodes d'introduction la relative fréquence et persistance dans la suite du récit de certains traits particulier; tel l'épis, de l'épine que l'on retrouve dans 17 versions. Il est évidemment exclus des 14 versions où intervient le diable -; tel est le motif des bras recréés par l'eau dans 25 versions; tel encore, précédant et amenant la scène de reconnaissance, celui du chapeau ou de la jambe du père endormi glissant à terre dans 18 versions.
L'abandon de l'héroïne, une première fois comme jeune fille, une seconde fois comme jeune femme et jeune mère, a parfois amené un certain flottement ou encore a "retardé" la mutilation de l'héroïne
On notera également des contamination avec des contes voisins, (T707)
Au Canada, Soeur Sainte Hélène-de-la-foi au collège N.D de Bellevue à Québec, a Préparé, sous la direction du Prof. L. Lacourcière, une étude de ce conte type d'un si riche passé.
On pourra se reporter aussi à la monographie de Heinrich Daümling (6) L'auteur, il est vrai, s'il étudie de façon approfondie les versions littéraires ne réserve que les dernières pages de son étude aux versions orales. Il ne cite que 7 versions, françaises.
D'après Paul Delarue. Catalogue du conte populaire français.
Entrée libre