Euroconte

 
mercredi 5 février 2025Anthropologie de la communication orale ...» Communication orale ...» Paroles vivantes ...» Liens  ...» Séminaire n°8 ...» Compte rendu MOTI 8Connexion
 Chercher

.
  

L'équipe du Cmlo
CMLO 15 Quai Boissier de Sauvages 30100 Alès -Tél 04 66 56 67 69
    

  

En cours

 

Mémoire et Inter culturalité

 

Alès, 12 et 13 Décembre 2006

 

Présentation :

Marc

Fatima

Anne

Geneviève

Marion

Fabien

Didia

Benoît

 

 

Quelle mémoire peuvent avoir deux peuples de leur acculturation permanente ? A terme, cela peut devenir le noeud de la négociation. Savoir se dire, ce n’est pas simplement affirmer sa nationalité mais savoir ce que nous partageons de commun (et de différent) dans notre histoire.

Pour nous il s’agit également de déterminer le champ du concept d’acculturation, et de comprendre de quelle façon une culture essaye toujours d’imposer sa domination sur une autre. Le processus d’acculturation pose problème lorsque la culture dominante impose son modèle par déculturation. On demande à l’autre de renoncer à ce qui était son histoire pour assimiler un autre culture.

 

Par exemple, la civilisation romaine a laissé relativement peux de traces sur les mentalités, mais beaucoup plus au niveaux de l’aménagement territorial. Les romains empruntaient les systèmes de croyances des autres peuples, on pourrait dire qu’ils étaient dans une acculturation permanente. Là où ils arrivaient, le monde celte par exemple, ils découvrent le dieu guerrier Epona et l’intronise dans leur panthéon. Le panthéon romain est composé de divinités d’autres civilisations, pour eux, l’important n’est pas l’origine du dieu mais son efficience symbolique, son pouvoir magique. Les romains n’avaient pas de complexe sur le fait d’emprunter aux autres leurs croyances, ce qui important c’était l’hégémonie de leur civilisation, c’est à cette fin qu’ils visaient la pleine gestion des territoires conquis.

 

Les grecs eux ont ébauché des organisations idéales, comme la démocratie, et la cité. Ils sont passés d’une société rurale, animiste à une société urbaine, la polis. Cette situation nous intéresse particulièrement en France, car nous sommes passés d’une société essentiellement rurale, à un mode de vie semi bourgeois urbain. Il serait intéressant de réaliser une enquête sur les conséquences de la « normalisation de l’habitat » : la même maison, les mêmes couleurs, et tous ces standards imposés. Une telle attitude peut avoir des répercussions écologiques. Le fait d’implanter des haies identiques sur un territoire peut provoquer le développement d’une race d’insecte particulier, ce qui pourra entraîner une disparition de certaines espèces d’oiseaux, … on peut nuire à la bio-diversité par le simple fait de l’acculturation. L’extension du normatif à travers les valeurs peut nous conduire à des désastres écologiques[1].

 

Quand on travail sur l’inter culturalité, ce qui est intéressant entre autre, c’est de voir où se jouent les modifications de valeurs, et surtout quelles sont les valeurs auxquelles on va refuser de toucher et que l’on va imposer sans négoce. La langue est elle aussi un espace de valeur. Si les autochtones ont la volonté de parler occitan aujourd’hui ce n’est pas innocent, ils partagent des valeurs propres à une communauté, et là on revient à la notion d’identité (cf Sem 2) et de reconnaissance. Disk 1 piste 9, -2mn50

 

C’est la notion de « normalisation des valeurs » qui doit nous servir de fil conducteur. C’est une normalisation mais le terme doit être entendu comme une sorte de standardisation, une imposition de stéréotype culturel. Cette normalisation est à la fois un lieu essentiel en ce qu’elle favorise la possibilité d’un vivre ensemble, mais alors cela suppose que les gens soient dans une acceptation de la diversité. Reconnaître l’autre pour ce qu’il est sans chercher à lui imposer ce que l’on voudrait qu’il soit, c’est quelque chose d’assez nouveau. En soi, on peut dire que c’est encore un champ culturel en friche. A partir du moment où l’on aura passé cette ouverture là, on pourra créer du normatif, ie, créer des valeurs, du stéréotype. Le stéréotype est un lieu d’acculturation, et paradoxalement, d’atténuation de la diversité. Lorsque je me suis rendu  à Strasbourg pour assister à ce colloque sur l’inter culturalité, c’est exactement ce propos qui a retenu mon attention (Cf. Sem. Quelle langue pour transmettre la mémoire ?) : « Moins il y a d’inter culturalité et plus on fait de colloque sur l’inter culturalité. » Cet aspect est très intéressant, nous nous trouvons dans une situation paradoxale, puisque d’un côté nous vivons dans un Etat qui affirme systématiquement sa volonté de créer du normatif, et d’un autre côté nous sommes dans une dynamique qui prétend à la diversité culturelle en permanence. »

Fatima

« Oui mais c’est parce que l’être humain est vivant, c’est un laboratoire. »

 

Marc

« Oui mais en même temps je pense que cet espace là est  important quand on travaille sur les problématique de l’immigration : comment d’une part avons la volonté d’imposer nos stéréotypes culturels tout en cherchant à maintenir une diversité culturel. Il y a comme une sorte de contradiction. »

 

Fatima

«  Mais il y eu une histoire. Pour certains peuples, normalement on devrait avoir la réponse. »

Marc

 « La réponse n’existe pas, justement parce que l’histoire n’est pas un lieu d’éclaircissement d’état, mais la résultante culturelle on ne sait jamais ce qu’elle peut devenir. Si tu mets côte à côte deux personnes de cultures différentes, tu ne peux pas savoir ce qui va se passer. La situation d’aujourd’hui ne sera pas forcément celle de demain. Si on ne prend pas compte cette mobilité permanente …

Fatima

« Oui mais il y a  des attaches (TocToc en même temps qu’elle prononce ces mots Fatima frappe sur la table pour donner corps à son propos) des choses qui restent. »

 

Marc

« Pour moi la mémoire est un lieu qui nous appelle à rester fidèle à notre histoire, et l’inter culturalité désigne la possibilité d’être traître vis à vis de cet histoire. Donc l’inter culturalité nous permet de transgresser cette Histoire.[2]

Aujourd’hui le vrai problème de l’inter culturalité pour moi il est là, pourquoi éprouve-t-on autant de culpabilité avec l’histoire coloniale ? Parce que si on veut aller pleinement dans la reconnaissance de l’autre, il faut transgressé le fait de cette idéalisation de notre mémoire coloniale. »

 

Geneviève

« Finalement, toutes ces manifestation qui se veulent interculturelles relèvent plus de l’exotisme que d’autres choses. »

 

Marc

« L’exotisme peut devenir un moyen de se dédouaner de notre responsabilité. Mais l’interculturel est là pour qu’on puisse partager des choses profondes. Si on organise une rencontre autour d’un repas traditionnel, on ne peut pas faire un repas pour un repas. Si derrière il n’y a pas une réflexion, un but, un travail de fond mener par des médiateurs pour rebondir sur les espaces de valeurs sous jacents, afin de mettre en action la parole et la conscience, ce n’est pas de l’interculturel.

C’est tout le problème des projets qu’on appelle « interculturels », ce qui va être important c’est comment derrière ce projet là, il y a un objectif qui dépasse le simple fait de passer un bon moment ensemble, quelque chose qui relève de la construction culturelle. Alors bien sûr, quand il y a confrontation, le repas peut devenir un peu moins digeste, parce que les choses ne se passent pas toujours comme on le souhaiterait. »

 

Didia

«  Moi je suis en plein dedans actuellement, et il y a des choses avec lesquelles j’étais très étonnée, comme le fait de débattre pour savoir s’il fallait préparer un pot au feu ou un couscous : qu’est-ce qui avait le plus de valeur ? Fallait il garder le pot au feu, le couscous ? Alors on a gardé les deux évidemment, mais il y eu débat. Comme le dit Marc, cela se prépare à l’avance, je mets en place des ateliers de cuisine mais le but c’est de construire un livret de recettes, pour l’offrir, avec tous les ingrédients, les préparations, et puis faire découvrir les histoires qu’il y a derrière ces plats. Mais ce sont posées des questions auxquelles je n’étais pas prête à répondre. Donc j’étais à la fois dans un espace de négociation où j’ai pas mal joué avec les portes paroles, j’étais en quelque sorte garante du groupe pour ne pas que cela dégénère, il y a eu des moments limites.

 

Marc

«  Ce qui est important, c’est de voir avec le couscous, toute l’histoire qu’il y a derrière ce plat. Quand  on mange un couscous, ce qui est important c’est de savoir quand est ce qu’on va le manger, pourquoi à tel moment et pas un autre ? Pourquoi ce couscous et pas un autre ? Derrière ce plat il y a une histoire qui touche à la culture, à la religion, aux valeurs de partage, c’est cela qui va donner toute son importance. Si on organise une rencontre autour d’un repas, il est important d’éclairer les fondements, ce que cela représente comme valeurs, comme choix pour que l’autre ne soit pas uniquement dans une appréciation gustative mais qu’il mette du sens sur le gustatif. Ce qui est important c’est de partager quelque chose qui n’est pas que de l’alimentation, mais également du symbolique.

 

Fatima

«  Cela se perd. »

 

Marc

«  Si tu dis que cela se perd, cela signifie qu’on est dans une phase de déculturation. On passe de l’acculturation à la déculturation par le simple fait qu’on perd le sens des éléments qui portent les valeurs. Si tu manges un couscous que tu as préparé à partir d’une boîte de conserve, et que tu n’es plus capable de dire d’où cela vient, tu es en phase de déculturation. Tous les grands plats régionaux, la choucroute alsacienne, la potée auvergnate… sont des plats chargés au-delà du côté gustatif de tout un élément symbolique. Ce ne sont pas des plats qu’on faisait n’importe quand à l’époque. On les préparait à des moments particuliers, pour des raisons particulières. Et c’est cela qui fait culture. Là on est dans le culinaire, mais on peut prendre une multitude d’exemples.

 

Didia

« Alors moi j’ai appris l’existence du meslouf, c’est un type de couscous qu’on donnait à la femme enceinte. »

 

Marc

«  Alors ce qui est intéressant c’est de se demander pourquoi ? »

 

Didia

« Ben, on continue. »

 

Marc

« C’est là que ça devient intéressant, c’est de se poser la question du pourquoi. L’anthropologue lorsqu’il travaille sur l’alimentation, ce n’est pas seulement la recette qui l’intéresse, mais ce qu’il y a derrière les recettes, ie, les espaces symboliques à partir desquels les valeurs sont communiquées. Les espaces symboliques sont des lieux de transmissions des valeurs. Ils vont passer par la cuisine, les vêtements, les attitudes, par des rituels. Parce que servir un plat de couscous, cela engage tout un rituel. Rien n’est gratuit.

 

Fatima

«  Cela se perd, il y a des renoncements, les personnes âgées connaissent les raisons de traditions, mais leurs enfants et leurs petits enfants parfois, renoncent à ce savoir. »

 

Marion

« Est-ce que le plat va orienter la conversation ? »

 

Marc

« Si je vais manger un couscous dans une famille traditionnelle au maroc, je vais faire en sorte de respecter le rituel qui accompagne le plat. Même si les gens ne sont pas capables de me le donner, je sais que pour eux cela a du sens. Et donc cela signifie que partager un plat ce n’est uniquement manger, c’est aussi dire, en mangeant, je suis votre convive, je suis votre hôte, donc je respecte aussi vos valeurs et vos codes. Cela veut dire aussi que la convivialité, qu’aujourd’hui on pense comme le fait de passer un bon moment ensemble, c’est plus que cela, c’est vivre avec l’autre (con-vivialité) : c’est partager la vie de quelqu’un, c’est quelque chose de profond, et pas uniquement pour passer un moment agréable, marrant. Partager un repas uniquement pour la détente, c’est qu’il n’y a plus rien, on est dans la déculturation. La détente est nécessaire à un moment donné, mais tant qu’on ne la dépasse pas on n’est pas dans la convivialité, on ne vit pas avec l’autre ce quelque chose de fort qui fonde ses convictions.

 

Fatima

« Aujourd’hui, les gens ne se rencontrent même plus pour la détente. »

 

Marc

« on ne se détend moins maintenant, C’est moins piquant. » Rires

 

Marion

« Mais par exemple, dans une culture où les gens connaissent le plat, est-ce que ce plat oriente plus spécialement une conversation, et faire taire certains sujets tabous, consciemment ou inconsciemment. »

 

Marc

« C'est-à-dire qu’il ne faut pas griller les étapes. Le fait de la convivialité c’est un espace de partage, on n’est pas obligé de parler de fond, mais tout simplement de partager. On peut être curieux aussi, et poser des questions sur la façon dont le plat est préparé. C’esdt à partir de là que s’installe la possibilité d’une reconnaissance de l’autre, à travers son savoir faire, sa technique. Et c’est souvent à partir de cette technique que la lecture des codes culturels se met en place. A partir de là, la personne ne parle plus du plat mais de tout ce qui entoure le plat, que ce soit la religion, la société, la famille. On ne partage plus seulement le plat mais ce qui a conçu le plat, c’est une espace symbolique, et pas simplement un lieu de l’alimentation, sinon on mange des pâtes. »

 

Benoît à Didia

« Et ce processus de questionnement, est- ce qu’il a eu lieu lors de l’atelier cuisine ? »

 

Didia

« Oui complètement. Un de mes collègues, qui est d’origine sicilienne, minimisait l’importance de la question de la présentation. Les gens ont tout de suite joué le jeu, ils voulaient présenter leurs plats. Et le côté convivial du plat, qui fait partie d’un tout, est remonté à la surface. On n’apporte pas uniquement un plat, une recette, mais aussi toute l’ambiance qui règne autour.

 

Marc

« C’est un espace où tu n’offres pas uniquement à manger, mais tu te dis, au travers de ce que tu cuisines. C’est un lieu de ta propre révélation, de ce que tu connais de tes traditions, de tes valeurs, de la façon dont tu t’intègres dans un groupe. C’est ça la cuisine traditonnelle. »

 

Didia

«  Il y a eu la négociation avec une personne qui voulait cuisiner des pizzas aux jambon. Il y eu des retours de la part des musulmans, qui ont expliqué qu’ils ne pourraient pas y goûter s’il y avait du jambon dedans. Alors ensuite, certains ont proposer de faire un table à part avec du jambon. D’autres ont répondu que mettre une table à part, c’était les mettre à part. Donc c’est tout cela qu’il a fallu négocier, puisqu’on voulait faire une table en commun avec tous les mets. »

 

Marc

« Donc là on est bien dans la notion d’inter culturalité. Comment, en faisant trop de concession, on peut perdre une part de la culture ? Donc c’est un lieu de la négociation. L’interculrel passe souvent par là : comment je renonce à une chose pour aller vers l’autre ? Donc là, je renonce au jambon, mais je garde la pâte. Rires. »

 

Didia

« Tout à l’heure tu parlais de dominant-dominé. Et bien la personne qui voulait cuisiner avec du jambon s’est confronté à une autre qui était un peu le leader dans le groupe, et qui de fait, s’est retrouvée appeler « chef ». Alors, à la fin de la rencontre, elle a expliqué qu’elle ne voulait pas jouer au chef mais juste préciser qu’elle trouvait dommage de ne pas pouvoir goûter à la pizza. Ceux sont ces petites choses de cet ordre là qui s’installe, alors des fois je laisse dire, parce que je pense que je ne peux pas intervenir sur tout, il y a des choses qui se construisent, et puis il y a des moments où je fais véhiculer la parole, je reformule en essayant de ne pas modifier ce qui est dit, et de ne pas influencer toutes données. C’est dur.

 

Marc

«  Je pense que ce n’est pas sur ce moment là que se joue la problématique. Ce qui est intéressant pour un animateur au moment de la rencontre, c’est de repérer où sont les espaces de conservation volontaire, involontaires, les espaces où l’on accepte de mettre en place la négociation, là où on est capable de dire oui à l’autre. En l’occurrence, l’autre ne veut pas de jambon, alors j’accepte de l’enlever, et comment vais-je trouver autre chose. »

 

Didia

«  Le halal. Tout le monde peut en manger, ça ne fait de mal à personne. »

 

Marion

« C’est quoi le halal ? »

 

Didia

« Le halal c’est une viande issue d’un animal égorgé selon un rituel  qui le purifie, c’est une viande bénite. »

 

Marc

« On est dans le même principe que l’acculturation avec les langues lorsqu’on décide de choisir ce mot plutôt que celui-là, parce que celui là va faire sens et pas l’autre. On est toujours sur des espace de cet ordre là lors de la rencontre de deux cultures, à un moment donné, on va trouver un espace commun pour pouvoir vivre ensemble, et pas uniquement dans le conflit ou le refus de l’autre. Lorsqu’on cède un élément, c’est tout le système de représentation qui est modifié. C’est aussi en cela que consiste l’apprentissage, ce n’est pas tellement le fait de savoir quelque chose, mais de comprendre comment est ce que je vais intégrer une nouvelle donnée à mon système de représentation. Parfois on a des interdits qu’on ne s’explique pas, cela remet tellement de choses en causes qu’on ne l’accepte pas.

 

Anne

« Cette histoire de négociation autour des repas ça me fait penser à ce qui se passe aec mes belle filles, quand elles sont chez moi. Quand on prépare le repas, tout le monde est prêt à donner la main, mais alors on n’est jamais d’accord sur la façon de préparer. »

 

Geneviève

« C’est ce qui se passe aussi avec des gens issus de différents pays. On le rencontre entre urbains et ruraux, de façon inter régionale, de familles différentes… »

 

Marc

« Au sein même d’un famille on est en situation interculturelle, même avec des gens qui sont nés au même endroit. Ceux sont des niveaux d’inter culturalité que tu décris. Plus il va y avoir des choses à bouger, plus ce sera difficile. Là on est au cœur du sujet, parce que la mémoire  qu’est ce qui va être en jeu avec le couscous au le pot au feu? C’est aussi tout ce qui nous été transmis pour le faire, comment notre mère, notre tente… nous a appris à faire le plat. Derrière il y a tout un espace idéologique, un espace affectif qui va avec et qui peut faire qu’on n’a pas envie de changer, parce que c’est comme ça qu’on a appris à le faire.

 

Quand on veut être dans l’inter culturalité on peut être amener à renoncer à des espaces affectifs, et cela n’est pas évident. La mémoire peut devenir un frein à ce niveau là, et parfois même sans qu’on le sache. Parce que si on trahit l’espace affectif, cela revient à remettre en cause notre propre mémoire. Les espaces affectifs sont des lieux que la mémoire garde profondément, on a vu la dernière fois que l’émotion est un marqueur de mémoire. Chaque fois qu’il y a un espace émotif dans une transmission, la mémoire s’ancre dessus, c’est de cette façon que l’individu se structure. Les situations d’inter culturalité peuvent nous amener à renoncer à des espaces qui sont des lieux marqueurs de la mémoire. Ce n’est pas toujours facile, et je dirai même que c’est parfois impossible.

Quand on veut parler de l’inter culturalité on est obligé de prendre en compte la complexité de l’humain. Notre inconscient joue un rôle très fort. La mémoire freine la rencontre quand elle n’est pas conscientisée. Une fois que l’on sait où cela peut bloquer, on sait où il est possible d’avoir à négocier, mais tant qu’on est dans le réactif, on ne peut pas.

 

Geneviève

« Oui mais c’est un peu ce que je pensai quand tu as prononcé le terme de renoncement. Il y a des renoncements qui ne peuvent pas se faire. Mais on peut quand même se rejoindre en sachant où est la position de chacun : on le prend en compte mais on admet qu’on ira pas jusqu’à l’autre, ou que l’autre ne viendra pas jusqu’à nous. »

 

Marc

« Bien sûr, ce que je veux dire, ce serait l’idéal de pouvoir dire à l’autre «  et ben, écoute là tu vois ça, c’est ma grand-mère qui me l’a transmis, excuse mais là je ne pourrais jamais renoncer. C’est un lieu de ma mémoire, c’est un lieu de l’affectif que je ne veux pas lâcher. » Et là ça sera très bien accepté par l’autre. Mais qu’est ce qu’on est en train de faire quand on dit cela ? On est en train de conscientiser des espaces, alors que souvent on va réagir sans savoir d’où ça vient.

Une fois de plus, aller vers l’altérité n’est possible que si l’on est conscient de ses propres blocages. C’est un travail sur soi. Et ce qu’on demande beaucoup dans l’altérité aujourd’hui, c’est que c’est à l’autre de faire ce travail là. Mais nous on n’a pas envie de le faire. Alors l’autre jouer le rôle de bouc émissaire parce que nous même ne sommes pas capable d’envisager nos propres espaces affectifs comme des lieux de fermetures inconscients. Dans l’inter culturalité, c’est ce qui va se jouer. Celui qu’on appelle le raciste, c’est souvent le bon bouc émissaire. C’est celui que l’on considère comme autre qui porte le maximum de responsabilité. Autant d’un côté  que de l’autre. Silence.

 

Benoît

« On pourrait le formuler en disant que le racisme résulte d’une absence de renoncement à nos espace affectif. »

 

Marc

 « Oui, et en plus on ne peut pas en vouloir à la  personne. Mais je dirai que c’est plutôt une absence de conscience. Quand on a besoin du bouc émissaire, ce n’est pas conscient. C’est souvent parce qu’on se sent mal avec quelque chose qui nous a été envoyé en pleine figure, sans qu’on sache pourquoi cela nous blesse, alors on dit de l’autre que c’est un imbécile. Il nous a blessé à un endroit qu’on n’est pas capable de cibler, alors on le vit comme une agression. Mais là où il y a vraiment agression, c’est que la personne a touché juste. Ce ne sont pas les choses qui nous passent au dessus de la tête qui nous blessent. Les personnes qui te renvoie à des endroits qui pour toi correspondent à des deuils, des blocages. Cette personne là on ne veut plus la voir. On la met de côté parce qu’elle a touché exactement au bon endroit.

 

C’est ça le gros problème dans l’inter culturalité, et c’est souvent cela qui va se jouer, comme l’autre est différent sur certaines valeurs, certaines normes il va souvent nous mettre à mal sur des les blocages provoquées par nos normes et valeurs. Il peut arriver qu’ion ait pas envie de travailler la dessus parce qu’on est complètement construit identitairement sur ces normes et valeurs. Le plus difficile dans l’inter culturalité c’est la remise en cause par l’altérité des codes culturels. On le voit, tout simplement, en affirmant ce qui est différent de nous nous remettons en cause nos propres fondements ». Silence.

 

Geneviève

 « Moi je préfère la première étape qui est celle de la prise de conscience. Il me semble que c’est déjà la première étape nécessaire. Après, on fait le choix d’aller ou de ne pas aller vers le renoncement[3]. C’est la prise de conscience qui peut nous permettre d’éviter le racisme. On n’est obligé de commencer par là pour ne pas être blessé par l’autre.

 

Fatima

« Il y a des gens qui son conscients de leur inconscient et qui continuent à faire du mal. Et pourquoi ? Cela dépasse…

 

Marc

« Il peut y avoir du protectionnisme aussi, c’est un ressenti fragilisé. »

 

Fatima

«  Un adulte à partir d’un moment il peut comprendre mais ce n’est pas suffisant. »

 

Marc

« Ce n’est pas pour rien si on dit que les voyages forment la jeunesse. Voyager, si on est dans un certain conditionnement d’acceptation, c’est une capacité de se mettre à distance de soi même. De part l’autre, on est obligé de voir comment on est nous même. Donc c’est une prise de conscience de nos propres fondements puisque l’autre, en face, nous renvoie une image de ce qu’on n’est pas. Donc de ce qu’on est aussi, par définition.

 

Fatima

« Il y a des philosophes qui étaient pour le voyage à l’étranger pour se rendre compte qu’il y avait des points communs, et des dissemblances. »

Anne

 « La vérité, euh, il ne faut pas toujours voir le côté négatif. »

 

Fatima

« Mais non, mais oui, mais non je ne vois pas toujours le côté négatif. »

 

Anne

« Je suis toujours curieuses des autres cultures. Ce qui fait tout l’intérêt pour moi c’est leur différence. »

 

Marc

« Ce que je veux dire par là, c’est que chaque fois tu dis quelque chose, tu n’es pas obligé d’être « confronté à ». Tu n’es pas obligé d’accepter non plus. Ce qui est intéressant c’est que vouloir connaître l’autre c’est déjà vouloir se connaître soit même.

 

Geneviève

« Quand tu parles de renoncement, je crois qu’il faut faire en sorte que ce renoncement ne se traduise pas par une perte de la diversité culturelle. On parlait tout à l’heure du normatif. Moi je pense que si on va trop loin dans l’acculturation, on peut faire disparaître la diversité. La reconnaissance de l’autre, c’est important mais on peut le reconnaître et l’aimer comme différent.

 

Marc

«  Ce qui est important c’est qu’à partir du moment où l’autre te donne conscience de ce que tu es, alors tu peux affirmer ce que tu souhaites conserver ou changer, ie, ce que tu peux remettre en cause. La diversité, pour moi, n’est pas en danger. Je pense même que c’est un leurre la notion de diversité en danger. Vu la diversité, on est tous différents. Personne n’a la même expérience de vie, donc on développe tous des identités différentes.

 

Marion

«  C’est d’ailleurs ce qui fait notre richesse. »

 

Geneviève

«  Quand on regarde notre monde, il me semble qu’on tend vers une uniformisation des choses. Non ? »

 

Marion

« Mais c’est la politique qui veut ça. »

 

Fatima

«  Mais c’est politique bien sûr. »

 

Geneviève

« Tout le monde vit dans les mêmes appartements, portent les même habits… »

 

Marion

«  Mais la vie en banlieue peut être agréable. »

 

Anne

«  Mais c’est autre chose. »

 

Fatima

«  On a tendance à parler des banlieues mais dans les banlieues, il y a des personnes qui sont intéressantes. Comme les gens n’y vont pas ils ont tendance à imaginer, et les médias s’en servent pour critiquer la situation, alors que la réalité est toute autre. »

 

Marc

« La grosse problématique du monde contemporain n’est pas liée au manque de diversité. Ce qui me fait peur c’est l’absence, le manque de terra incognita, les terres inconnues, lieux de l’imaginaire par excellence et cela c’est vrai, s’accentue de plus en plus. Parce qu’on est de plus en plus en connaissance. Alors qu’est-ce qu’on va faire, surtout aujourd’hui, et ben, qu’est ce que c’est la science fiction ?

 

Benoît

« La terre inconnue se déplace. »

 

Marc

« Elle se déplace, on va la mettre dans des espaces inter stellaire, la refouler beaucoup plus loin mais en réalité ce qui nous fait peur c’est cette perte d’un espace symbolique où l’imaginaire peut se développer. Mais la diversité elle sera toujours, même si les cultures se rencontrent. La question c’est de savoir ce qui va se jouer au travers de ces rencontres ? Y aura-t-il une meilleure lisibilité des autres cultures ?

Les contacts seront de plus en plus importants, dons les acculturations seront de plus en plus fortes.

 

Didia

 «  C’est vrai, cela confirme bien le proverbe : trop d’information tue l’information. »

 

Marc

« Et je pense que la diversité se conserve car le potentiel de l’humain à rencontrer l’autre est relativement restreint. On ne peut pas rencontrer 90 millions de personnes, on n’en rencontre véritablement qu’une dizaine autour de soi. Les autres seront toujours dans la diversité. Et ce sera toujours un monde qu’on ne peut pas rencontrer, si on veut aller dans ce sens là ; Non, je ne crois pas la diversité soit en danger, mais c’est évident que dans l’intercompréhension sera de plus en plus grande normalement, si cela se joue bien. Cela peut être aussi très positif. Mais cela nécessite aussi des espaces de rencontres, difficiles à mettre en place.

 

Aujourd’hui, on se sent atteint dans l’autochtonie. Je crois que la notion d’autochtonie est importante dans ce jeu. Etre possesseur de la terre, être le possesseur de l’espace. Je crois que là, il y a un gros blocage, dans l’inter culturalité. On défend le territoire, qu’il soit matériel ou intellectuel. On a peur que l’autre détruise ce territoire. C’est la peur qui ouvre la porte au racisme.

Les quartiers illustrent parfaitement cette idée pour moi. On amène des personnes sur un no man’s land. Personne n’a d’intérêt sur ce territoire, donc on peut laisser les personnes qui ne sont pas d’ici sur ce quartier là. A partir de cette situation, vous analyser où sont les quartiers, vous allez voir, c’est parlant. Il s’agit toujours d’espaces qui étaient soit des jardins sans véritables propriétaires, des anciennes usines que l’on a rasé, des garigues dont on ne pouvait rien faire, bref ceux sont toujours des espaces sans enjeu symbolique pour l’autochtone.

L’inter culturalité nous confronte à la peur de l’autre. Nous avons peur qu’ils viennent mettre en rupture les normes qui nous ont permis de nous fédérer. Comme le dit Ahmed Bouzine, « les conteurs sont des broyeurs de sens ». Quand tu apportes une nouvelle conception du monde, il est évident que la tienne en prend un coup aussi. Tout le sens que tu as construis prends une claque. Tu es obligé de refaire sens, autrement, donc tu es bien dans un broyage de sens. Dès que tu te confrontes à l’altérité, tu prends le risque que l’autre te te séduise dans ses concepts, ses représentations du monde, et si tu commence à les accepter alors tu mets en danger l’unité de la communauté, à travers la remise en cause de toute sa conception, et sa façon de voir le monde. Donc tu mets du désordre, tu mets du chaos.

 

Benoît

« On retrouve cette problématique avec les philosophes qui ont chacun un rapport au langage très particulier, qui fait système, et où la vision du monde est complètement différente de celle qu’on a pu contracté au cours de notre vie. Par exemple, Hegel a développé l’idée d’une pensée dialectique. Bon, ce n’est pas lui qui l’a inventé, on trouve déjà l’idée de dialectique chez les grecs. En fait la dialectique c’est le processus par lequel la conscience va se nier, ie, accepter d’être autre, pour finalement redevenir elle-même, autrement. Au lycée, on dit, « Thèse-antithèse-synthèse », pour illustrer ce schéma dialectique, mais en fin de compte la dialectique, c’est le cheminement de toute pensée. Ce qui est intéressant, dans la dialectique hégélienne en particulier, c’est que le résultat final est déjà présent dès la première étape. C’est pour cela que quelqu’un qui n’a jamais « pratiqué » de philosophie, lorsqu’il lit la phénoménologie de l’esprit, accompli le cheminement dialectique. Dans un premier temps, il ne comprend rien, mais il doit accepter de ne rien comprendre pour qu’à terme il revienne au début et relise le livre. Je ne me suis pas adonné à cet exercice avec Hegel. Rires. Je n’ai pas réussi. Mais avec la plupart des philosophes, c’est un peu la même chose en fait. Vraiment.

 

Marc

« L’ethnologie est très hégélienne, parce que quelque part c’est un petit peu ça, tu pars sur le terrain, tu te perds, tu te laisses perdre, puis tu reviens, et tu relis tous tes grands concepts qui ont été posés d’emblée, mais avec cette fois ton expérience en plus, ce qui te permet de remettre en cause ta vision de départ.

 

Un dernier point dont je voudrai parler, parce qu’il est important pour notre travail, c’est la notion de syncrétisme :

Le syncrétisme c’est le processus de refonte des différents concepts culturels entre eux.

Didia

«  Le choc culturel fait il partie de ce syncrétisme. »

 

Marc

« C’est une des étapes, à un moment donné les cultures «  se frottent », avec parfois des retours au chaos, des remises en causes, des périodes de doute. Ce qui va résulté de ces « frottements », c’est le syncrétisme. On garde des petits bouts de chaque, on refonde une culture qui intègre les autres. La créolité est un témoin intéressant à ce niveau là. Elle est l’aboutissement d’une refonte des langages.

Le syncrétisme est un processus que je qualifierai presque de « naturel », mais je crois que ce qu’on est en train de traiter là dans les rencontres, qui se font de plus en plus vite et dans un nombre croissant, sont des choses qu’on retrouve depuis l’antiquité la plus ancienne. On trouve des textes beaucoup plus ancien qui parlent déjà de ce syncrétisme, on a l’impression que c’est très contemporain, mais c’est vieux comme le monde. Ceci dit, en des époques plus reculées, tout le monde ne voyageait pas. Ici nous voyons qu’il y a un autre point à prendre en compte dans la notion d’interculturalité, c’est la notion de classe sociale. L’acculturation ne se fait pas uniquement entre des cultures ethniques, mais aussi au sein même d’une société, à travers la notion de classe sociale. La classe sociale peut rendre difficile le mélange des cultures. Il y a eu diverses époques de l’histoire de France lors desquelles les immigrés ne venaient pas pour travailler à l’université, ou en tant que médecin… ils venaient travailler sur les entreprises. C’étaient des gens issus de milieu paysan et qu’on venait faire travailler en zone urbaine. Donc en dehors du choc culturel, il y eu des chocs sociaux. Et c’est important de comprendre que la part majeure de l’immigration en France a fait son apparition dans une phase où justement les classes sociales se mettaient en rupture elles mêmes, notamment avec la disparition de la classe ouvrière[4].

Il faut le prendre en compte dans l’inter culturalité. Il y a une inter culturalité sociale que l’on prend rarement en compte.

 

Anne

« Il y a un exemple auquel j’ai souvent pensé pour illustrer cette interculturlaité sociale, il s’agit de l’organisation de l’habitat. Quand tu entres dans un logement d’ouvriers, tu rentres dans la cuisine, t’assoies à table et on t’offre à boire. Tu es dans la cuisine parce que c’est là qu’il y a la vie. Alors que quand tu entres dans un milieu bourgeois, la cuisine, on n’en sent pas même les odeurs, parce qu’elle est complètement isolée. On te reçoit dans le salon. Je ne sais pas pourquoi mais j’ai souvent pensé à cela, et du coup ce n’est pas la même ambiance.

Marc

 « Non parce qu’on est dans un espaces où le salon est porteur du symbolique. On te mets dans un espace intellectuel symbolique alors que tu entres dans une réalité pratique matérielle lorsque tu es dans la cuisine. On n’est dans deux espaces où on ne fait pas découvrir la même chose. Il s’agit bien d’un lieu de l’inter culturalité sociale, on ne dit pas la même chose de ses ancrages culturels selon l’espace de rencontre que l’on choisi. Si on regarde le monde paysan, une fois de plus c’est encore très différent. Les codes ne sont pas les mêmes, et les valeurs non plus.

A Chaouite me disait qu’il est très important de prendre en compte que la plupart des maghrébins qui sont arrivés en France étaient issus de milieux ruraux. Or s’ils étaient arrivaient dans les campagnes, il y aurait eu probablement moins de problèmes, parce que les codes étaient partagés. Alors qu’en arrivant dans un cadre urbain, ils étaient confrontés à un apprentissage énorme, et donc à une remise en cause complète de leur culture, de leur façon d’être, de leur façon de jouer le territoire. Je vous laisse imaginer la rupture qu’il peut y avoir lorsque vous n’avez plus la même langue, plus la même culture générale, plus le même habitat, plus le même territoire, plus les mêmes codes, plus le même climat… C’est le chaos total.

On est également obligé de voir comment se joue la relation à la diversité des classes en milieu urbain. Dans le monde paysan, tout est un peu catalogué dans le sens ou tout le monde connaît tout le monde, il y a des hiérarchies qui sont très claires. Mais dans le monde urbain toutes les classes sociales se rencontrent sur un même espace social. Je ne sais pas si vous voyez le nombre de codes qu’il faut assimiler pour quelqu’un qui arrive de l’extérieur sur un moment très court.

Pour vous donner un exemple, quand on va en Inde, souvent on dit qu’on est très dépaysé. En fait, si vous allez en Inde vous ferez l’expérience de cette rupture. Si vous allez dans la campagne vous ne sentirez peut être pas la différence, mais si vous vous rendez à Calcutta, c’est l’explosion totale dans la tête. Toutes les castes se rencontrent, et on ne sait plus très bien où on en est par ce qu’on n’a plus de lisibilité qui nous permette de savoir qui est qui. On voit des gens qui se repoussent, d’autres qui se rencontrent, mais on ne sait plus où on en est. Il y a des gens qui crèvent sur le trottoir avec le sourire, on est dans un lieu de la réincarnation. Tous nos repères éclatent complètement. On n’a pas de visibilité à ce niveau là même si intellectuellement on a la connaissance. C’est une situation comparable à celle que connaissent les gens du Maghreb lorsqu’ils sont venus en France à un moment donné. Plus rien n’est lisible. Ils sont issus d’une famille qui la plupart du temps est élargie au niveau d’un village, qui sont des gens de la famille. Leur espace temps, leur relation au paysage, leurs attitudes corporelles, il faut tout reconstruire en essayant de ne pas trop perdre ce qu’on était.

L’enjeu est là, en gros, comment ferions nous pour devenir indien, comment faire pour se fondre dans le monde hindou cela revient à se demander quelle caste je choisirai ? Je ne peux pas choisir ! Rires

 

Il y a deux solutions : ou je me retire avec les miens dans un quartier et où je sais à qui je ressemble, et peux essayer de trouver les clés (pendant longtemps l’effort d’assimilation nous a conduit à éviter le regroupement communautaire aujourd’hui nous savons que la communauté est indispensable dans un processus d’immigration, si on n’a pas la communauté pour se reposer et réfléchir un peu à des choses qui sont nôtres, ce n’est pas possible on devient fou).

 

Anne

«  Moi je trouve que c’est une question sérieuse que tu soulèves. Tu dis que les communautés sont indispensables au moment de l’accueil des immigrés et qu’il serait impensable de s’intégrer sans elle. Alors c’est toujours le problème des organisations. On laisse tous les immigrés dans le même quartier quitte à mettre d’un côté les italiens, de l’autre les algériens… mais cela facilitera encore moins l’inter culturalité.

 

Marc

« Ceux sont des choix qui ont été faits par certains pays, en Angleterre c’ets comme cela. »

 

Anne

«  oui mais ça pose d’autres problèmes. »

 

Marc

« Oui comme en France il y a d’autres problèmes, je crois qu’on n’a pas encore trouvé de solution. Faut-il reconstruire une poche de culture différente au sein d’une autre culture comme cela été le cas en Angleterre. Dans ce cas on mise sur un auto régulation. Où est ce qu’on tend vers une assimilation, une intégration en essayant de faire en sorte que l’autre soit comme nous. Aujourd’hui on parle de bi culturalité, on a fait des progrès, on n’est passé de l’assimilation-intégration à la possibilité d’une bi culturalité, mais en tous les cas ceux sont des processus très différents de la rencontre.

 

Anne

« Alors  je comprends bien qu’ un étranger quand il arrive  a besoin de se tourner vers sa communauté mais d’un autre côté il ne faut pas faire ces communautés. »

 

Fatima

« Cela se fait individuellement. »

 

Marc

 « Si tu prends les diasporas chinoises au Canada, quand tu arrives au canada, c’est eux qui t’accueillent, on t’indique les règles et tu n’as pas intérêt à les transgresser. Si tu transgresse ce n’est pas la police qui vient te chercher. »

 

Anne

«  C’est ce que font les chinois de paris. »

 

Marc

 « Il n’ y a aucun problème avec les diasporas chinoises au canada. Ceux sont des espaces d’auto régulation. Mais par contre que font –ils ? ils maintiennent les personnes dans une culture chinoise, à tel point que si tu veux connaître les contes traditionnels chinoir aujourd’hui, il ne faut pas aller en chine, mais au Canada. Là bas ils ont conservés les traditions chinoises, et racontent encore les vieux contes chinois dans leur version d’origine, version qu’on ne raconte plus en chine depuis la révolution culturelle. »

 

Geneviève

« Mais en France aussi elles sont fermées les communautés chinoises. »

 

Marc

« Tout à fait, mais ce que je veux dire par là c’est qu’il n y a pas de règles. C’est là qu’il faut faire attention. Comment je respecte la capacité de l’autre à rentrer dans l’inter culturalité. Une fois de plus la question à se poser est un peu celle que nous venons d’évoquer, si j’avais à devenir hindou, comment je m’y prendrai et comment je souhaiterai qu’on respecte le temps qu’il me faut pour cela ? Peut être me faudrait-il une, deux, voire trois ou quatre génération pour y parvenir, et peut être même je n’y parviendrai jamais ?

 

Le communautarisme est dangereux. C’est très dangereux de vouloir travailler sur l’inter culturalité en mettant des cases. On doit être conscient des cultures mais on doit faire en sorte de penser « rencontre des cultures » et pas « isolement des cultures ». Ce n’est pas facile, on aurait même tendance à faire se regrouper les communautés sur elles mêmes. »

 

Anne

« Aujourd’hui, on voit ce phénomène en ville au niveau des catégories sociales, puisque maintenant il y a endroit où on ne peux habiter que si on est dans une certaine tranche de revenus. Je pense que nos responsables ne devraient pas favoriser ce genre de politique.»

 

Fatima

« Les gens doivent se battre, il faut qu’il y ait une révolution. »

 

Marc

«  Ceux sont des choix politiques. »

 

Fatima

« Les gens acceptent mais jusqu’au jour où il y aura trop de disparité, et là ça ne passera pas. Ce n’est pas normal.»

 

Marc

 «  La disparité a toujours existé. Le problème, une fois, je crois que le réactif n’st jamais quelque chose de positif, de constructeur. Je consièdre que si on ne veut plus qu’il y ait de disparité, il faut se dire non pas on va faire la révloution mais que doit on changer comme valeurs, comme codes dans la sociétés…

 

Fatima

« Comme projets. »

 

Marc

« Comme projets, c'est-à-dire que va t –on offrir à l’autre comme posibilité d’être dans l’espace médian ? jusqu’à maintenant dans les sociétés capaitalistes, l’espace normatif, donc l’espace valorisé, c’est celui qui possède. La valeur est faite par la capacité à posséder des objets, des maisons, des actions… Alors derrière il y a tout un tas de questions qu’il faudrait soulevé, comme « Qui fait marcher la française des jeux ? » Ce ne seont pas les gens qui de l’argent qui misent tous les matins. Ce sont ceux qui ont le moins de budget qui tous les matins vont alimenter la française des jeux. »

 

Benoît

«  Le P.M.U possède un statut de banque. » Rires

 

Benoît

« C’est vrai, en plus. Moi quand je l’ai découvert j’été un peu abasourdi.»

 

Marc

« Cela signifie qu’on se trouve dans un espace normatif, et que si les gens l’alimentent à ce point, c’est que leur seul désir, est de posséder. »

 

Fatima

«  Ils sont prisonniers. »

 

Marc

« Oui, mais parce que c’est cet élément que l’on survalorise en permanence. Si vous regardez la télévision, dans les feuilletons, on ne va pas valoriser les personnes qui vivent modestement. On survalorise celui qui possède, qui a le pouvoir …

Une société quand on veut la changer, il faut se demander quelles sont les valeurs centrale à remplacer dans les esprits. Comment leur dire qu’on peut vivre heureux sans avoir une villa de trois milliards, et un yacht sur la riviera. » Rires.

 

Geneviève

«  En plus, je crois qu’il y un autre élément qui freine l’évolution des mentalités dans nos sociétés, c’est la peur. De plus en plus, au niveau des classes moyennes, on essaye de mettre de l’argent de côté et d’acheter des appartements, non pas parce qu’on veut posséder, mais parce qu’on anticipe sur sa situation de retraité. On pense qu’il faut à tout prix épargner pour qu’au moment de la retraite on ne se retrouve pas sans rien. Cette pensée systématique de l’effondrement post retraite frappe beaucoup la classe de la « trente quarantaine. » »

 

Marc

 « Mais c’est un moyen d’entretenir et d’alimenter le capitalisme. La peur est un moyen de te faire consommer. Et le bouc émissaire de l’immigration est très important à prendre en considération dans ce sens là. Plus il y a des quartiers qu’on monte en épingle, en montrant des jeunes qui brûlent des voitures… et plus les gens ont peur. Tu t’es endetté pendant trente ans pour acheter une voiture et on te la brûle. C’est de cette façon qu’on entretient des espaces de peur permanentes. Pourquoi a-t-on surmédiatisé les émeutes de 2006, alors que ce n’était pas des voitures extérieures qu’ils brûlaient, c’était les leurs. On n’en a fait un lieu de la peur générale, de manière à ce que les gens prennent des assurances  supplémentaires.

 

Benoît

« En voulant protester contre le système, ils l’ont alimenter. »

 

Marc

« L’espace réactif est toujours un jeu qui sert le pouvoir. Presque tout est récupérable, ce qui n’est l’est pas c’est l’intelligence : quand tu travailles sur des changements de fond. Les vraies révolutions se font sur le fond, lentement. »

 

Fatima

« Avant ces émeutes, il y a eu des discours de la part des médiateurs. Mais ces discours n’ont abouti sur aucun changement. »

 

Marc

« Pour revenir à notre sujet, l’inter culturalité se situe également au niveau de la volonté étatique. Gérer c’est prendre c’est créer les espaces de médiation qui permettent d’atteindre les objectifs fixés par l’état. L’inter culturalité doit permettre de servir ces objectifs. On peut s’en servir de façon constructive ou comme un lieu de réaction. Je pense qu’il y a de très bons conseillers au sein de nos gouvernements, et qu’ils savent analyser les situations. Rien n’est gratuit. Il y aura toujours des espaces de manipulation. Ils font d’ailleurs partie de la gestion. Gérer c’est bien manipuler. La manipulation au sens positif comme au négatif, on est obligé de manipuler l’autre quand on entre contact avec lui. Si on était uniquement dans la nature des choses, on se ferait manger très rapidement.

 

Benoît

« Michel foucault disait que le pouvoir c’est l’art de gouverner la liberté des autres. »

 

Marc

« Et tout homme est un être de pouvoir. Il faut être clair la dessus. Que cherche-t-on un quand on est humain, sinon vouloir manipuler l’autre un minima ? ce qui change entre les hommes, c’est le cercle d’influence. Je crois que le problème de l’animalité, c’est qu’on ne poeusx pas sortir du rapport dominant-dominé. Cela peut ne pas poser de problème, encore faut-il le savoir. »

 

Fabien

« Une vraie démarche interculturelle, ce serait de mettre en valeur toute cette diversité culturelle et arriver, à contrario du phénomène des banlieues… à faire en sorte que les gens se disent qu’il existe d’autres cultures, qui sont aussi les leurs finalement puisqu’elles viennent enrichir leur culture d’origine. Et finalement cela pourrait être un des aboutissants de l’interculturalité. »

 

Marc

« La connaissance de l’autre comme moyen de se connaître soi-même, c’est cela le moteur de la démarche inter culturelle. Le désir de la rencontre uniquement en vue de connaître l’autre, c’est de l’exotisme. Pour être dans une démarche interculturelle, il faut que ce désir de rencontrer l’autre soit motivé par la volonté de savoir qui on est, le désir d’avancer dans le cheminement de la connaissance de soi. C’est un enrichissement personnel qui est visé au fond.

Il faut qu’il y ait cette motivation pour alimenter le processus inter culturel, et c’est à travers elle qu’on s’aperçoit de l’importance de l’éducation. Pour le moment, l’école n’est pas vraiment soucieuse de développer cette fibre de la connaissance de soi. L’école est surtout en train d’essayer de former un système normatif étatique. »

 

Geneviève

«  Comme cela a toujours été. »

 

Marc

« Comme cela a toujours été. Et c’est normal. L’école est un espace au service de la gestion de l’état, de la régulation pour vivre en paix. »

 

Fabien

« il faut que cela soit un minimum homogène. »

 

Marc

« Il faut que cela soit homogène pour que l’on puisse vivre ensemble mais en même temps on voit très bien que l’école pourrait avoir un rôle plus important. »

 

Fabien

« Mais on ne peut s’enfermer dans l’universalisme à la française dans une France qui est désormais engagée dans une multi culturalité. Ce serait un paradoxe. »

 

Marc

« C’est un paradoxe, même les droits de l’homme seraient à réviser aujourd’hui, beaucoup d’article empêchent l’inter culturalité. »

 

Didia

« Lesquels ? »

 

Marc

« Je ne sais pas exactement mais il faudrait relire le travail de Léopold Ségar Senghor qui a énormément travaillé sur les articles droits de l’homme qui représentent un danger pour les autres cultures. »

 

Benoît

« Je voudrais juste faire un peu l’avocat du diable et nuancer le pouvoir de l’école qui, à mes yeux, en tant qu’institution de l’état, joue un rôle qu’elle n’assume pas. Son rôle consiste à distribuer, répartir et maintenir certaines classes sociales là où elles sont. Donc concernant l’inter culturalité, je pense que son objectif n’est pas nécessairement là. »

 

Marc

« Il n’est pas formulé comme cela. C’est évident que le rôle de l’école est de donner un savoir commun, normatif, qui permet de pouvoir graviter dans la globalité des classes sociales. Mais à terme, c’est dans les universités et les grandes écoles, que se joue la différence. »

 

Geneviève

« Et puis l’école est aussi le reflet, l’image de ce qui se passe dans notre société. Aujourd’hui on commence à s’affoler de quelque chose qui est déjà assez ancien, mais qui a pris des proportions énormes, le fait que chacun s’engouffre autant qu’il peut dans la filière scientifique parce qu’on a longtemps privilégié les sciences, pensant qu’elles représentaient le seul moyen d’être efficace. Le plus fâcheux étant selon moi, que la réponse de l’inspection a ce problème c’est de mettre des mathématiques dans la section littéraire.

Et puis toujours par rapport à l’école, il me semblait au début, pour avoir été témoin d’une évolution suffisamment  longue que, peut être, le fait d’avoir de plus en plus d’enseignants issus de l’immigration ( comme c’est le cas), pourrait faire évoluer les choses. Or je me suis aperçus au fil des années, qu’apparemment cela n’a pas changé grand-chose, soit parce qu’ils sont investis dans des matières purement scientifiques, soit parce qu’ils ont été assimilés et qu’à partir de là ils sont presque plus « dans le moule » que les autres, et n’apportent pas forcément l’ouverture que je présumais au départ. J’ai vraiment cette impression la.

 

Marc

« Ils sont devenus des models d’assimilation. »

 

Fabien

« C’est exactement comme l’entrée d’ ??? à l’académie française qui aurait pu apporter un renouveau à l’université mais qui finalement représente un model d’assimilation. »

 

Anne

 «  Comme Azouz Bégag »

 

Fabien

 « Au gouvernement, mais c’est encore un cas particulier, car il me semble qu’il a toujours revendiqué l’intégration au model républicain français. »

 

Marc

« Nous sommes allés jusqu’à la notion de syncrétisme, et nous voyons, pour résumer, qu’il peut se manifester comme un lieu de l’intégration. D’une certaine façon, en conservant ce que l’on est mais fondu dans la culture d’accueil. C’est un peu le message d’Azouz Bégag.

Un dernier point à envisager, ce serait le processus de mondialisation, car de plus en plus on va nous demander de nous affirmer comme « citoyen du monde », avant cela, on nous demande déjà d’être citoyen européen aujourd’hui, nous sommes donc encore sur des grands blocs, mais bientôt nous évoluerons sur un espace de citoyenneté mondiale. Cela veut dire que là aussi il y a un superbe travail à faire avant que l’on parvienne à accepter ça. On peut le penser idéologiquement, mais qu’est ce que cela veut dire « être citoyen du monde » ?

On commence à entendre des gens qui le revendiquent aujourd’hui « Je suis citoyen du monde ». Personnellement je vois dans cette revendication une sorte de refus masqué de tout Etat, voire un dénie d’appartenance culturelle. Souvent cette revendication s’ancre dans un espace de facilité, car elle permet à l’individu de ne pas avoir à se justifier : toutes les attitudes se valent, alors ne venez pas me casser les pieds ; je n’ai pas à chercher qui je suis.

Donc là aussi, le positif peut devenir négatif. Si cette citoyenneté mondiale devient un lieu de l’échappatoire de la conscience de ce que l’on est, cela peut être très négatif. Souhaitons qu’elle soit un espace d’ouverture, mais pour le moment les gens qui revendiquent ce statut sont plus, pour ceux que j’ai rencontré, dans une échappatoire que dans une ouverture.

 

Fatima

« C’est douloureux de répondre à la question de savoir « qui je suis ? ». »

 

Marc

« En général on fait cela sur un divan. » Rires.

 

Fabien

 « Et pas à la première séance. »Rires.

 

Marc

« Répondre à la question qui suis-je, cela me fait penser à un conte que raconte Catherine Zarcate, c’est l’histoire du chat qui se balade en quête d’identité. Sa première rencontre se passe avec des lapins, alors le lapin lui pose des carottes, mais il n’aime pas les carottes. Il comprend qu’il n’est pas un lapin, mais il est fatigué de ne pas savoir qui il est. Ensuite il rencontre toute une série d’animaux, qui tous lui apportent leurs aliments. Ça c’est un conte qu’il faudrait travailler dans l’inter culturalité. Ce qui est intéressant c’est que le protagoniste se pose lui-même la question, et pour se trouver, il fait la comparaison avec l’autre. Il va chez les lapins, il va chez les hérissons, chez hiboux, chez les écureuils et à chaque fois il fait la différence avec lui. C’est en trouvant ce qu’il n’est pas qu’il trouve ce qu’il est.

En inter culturalité, tu comprends l’autre parce qu’il te permet de définir ce que tu n’es pas. C’est aussi en ce sens là que la mondialisation peut s’avérer dangereuse dans la volonté de faire espace commun, unique sans aucune singularité. Alors je pense que l’unicité existe, c’est la caractéristique de l’humain : on a tous une part archétypale d’humain, on est tous des êtres verticaux qui marchent debout, on a tous des yeux pour voir, des oreilles pour entendre, et des mains pour toucher mais, il n’empêche qu’au-delà de cette unité, nous ne touchons, ni ne voyons ou n’entendons la même chose. Et la richesse de l’humain tient précisément en cette diversité. Toute la question de l’inter culturalité est de comprendre pourquoi ce n’est pas la même chose pour tous ?

C’est ce que nous sommes en train de travailler, et je dirai c’est par culture : la conception, la représentation que l’on a du monde va entraîner des perceptions différentes.

 

Anne

« Et c’est peut être en cet endroit qu’il faut essayer de définir exactement ce que c’est que la citoyenneté, parce que la citoyenneté mondiale, peut être existe-t-elle, et dans ce cas , elle serait partie intégrante de l’humain ? »

Marc

« Etre citoyen, c’est faire partie de la cité. La cité, selon la conception grecque, est une organisation qui possède ses propres valeurs, ses propres normes[5], un agir en démocratie. Au départ, pour faire partie de la cité, il faut en accepter les règles.

 

Anne

« La cité est une organisation. Il y a des lois qui viennent d’en haut qui régissent cette organisation. »

Marc

 « C’est pour cette raison que ce n’est pas partout la même chose. »

 

Anne

«  On est tous un peu citoyen du monde. »

 

Marc

 « Non parce que le monde n’est pas une cité. Si on voulait être citoyen du monde cela voudrqait que l’on voudrait être citoyen d’une diversité culturelle acceptée. »

 

Didia

« Ce n’est plus simplement une façon de dire qu’on est un être humain. Pour moi, cela revient à cela, c'est-à-dire, je ne suis qu’un humain. »

 

Marc

 « N’être qu’un humain, pour moi, cela n’a aucun sens. »

Rires

Didia

« Je ne suis pas un animal. »

 

Marc

« Oui c’est cela, cela signifie « j’accepte d’être un animal sans aucune conscience »[6]. Du moment que tu as une conscience, c’est que tu as une culture, par définition. Si tu as une mémoire, c’est que tu as une culture. Si tu as des projets, c’est que tu as une culture. Etre citoyen du monde à ce niveau là cela peut s’avérer très dangereux, tu es dans un espace réactif animal qui pour moi équivaut à affirmer être raciste. »

 

Didia

«  Ah, je n’avais pas vu les choses sous cet angle là. » Rires

 

Marc

 « Le racisme c’est la peur de l’autre, donc l’animal c’est quoi, la peur de tout ce qui est différent, par nécessité. Pour moi, si tu acceptes d’être citoyen du monde, ie, si tu prends le monde comme une cité, ie, comme quelque chose qui impose des règles différentes, par milliers, cela signifie que tu acceptes de ne pas faire de choix dans la valeur de cultures, dans ce sens c’est intéressant, ça veut dire que toutes les culture seraient valides, au même niveau. Pour moi c’est une utopie. Toutes les règles, les normes, les valeurs qui sont posées, que ce soit les dictatures fascistes, nazis, communistes et autres, c’est quelque chose qu’il faut accepter. »

 

Stupeur dans l’assemblée.

 

Marc « Et bien oui, c’est ce que signifie  être citoyen du monde. C’est pourquoi je dis que le monde n’est pas une cité. Etre citoyen du monde, c’est n’avoir aucune certitude, et donc c’est accepter toutes les valeurs imposées. »

 

Anne « D’accord, mais de toute façon, cette notion, je ne sais pas vraiment à quoi elle sert. »

Marc

 « Elle présente une dualité ; ou tu fais fi de toutes cultures, tu laisse la part la part animal de l’être humain, et tu acceptes toutes les valeurs et les normes existantes. Ou alors, tu attribues une loi générale sur le monde, et tu penses une polis (cité) mondiale, et tu es américain. Rires. »

 

Fabien

« Un citoyen du monde c’est peut être simplement quelqu’un qui ne s’en tient au découpage géographique des cultures. »

 

Marc

« Oui, mais je crois qu’il s’agit la plupart du temps de gens qui sont occidentalistes, et qui souhaiterai voir le monde régi par les valeurs occidentales. »

 

Fabien

« Quand allons nous parler de culture d’ailleurs ? Car j’aimerai bien que l’on m’explique un peu le découpage entre cultures. Par exemple, on peut parler de la culture cévenole par opposition à la culture bretonne (par exemple) mais on peut également parler de la culture occidentale par opposition à a culture orientale. Ma question est : sur quoi repose cette échelle des cultures ? »

 

Marc

« Il existe une histoire de la hiérarchie des cultures. Ce qui est intéressant c’est de voir que selon le lieu et l’époque, les valeurs diffèrent. La nomination des peuples est un indicateur. Ceux qu’on appelle les eskimos, s’appellent entre eux, Inuits. La plupart des peuples s’appellent « L’homme [7]». Donc tous les autres, ne sont pas des hommes.



[1] NB: Je crois que tu veux mettre en avant l’aspect contradictoire de l’homme moderne dans sa volonté de maîtriser l’environnement.

[2] NB : Comment se présente cette même histoire pour un autre que moi ?

[3] Cf. Question du libre arbitre, que je relierai avec la dialectique « conscient inconscient ».

[4] Plus disparition de la classe des ouvriers paysans.

[5] NB, selon la formule de Louis Gernet dans son anthropologie du monde grec, je dirai que la cité (polis) est le cadre transcendant dont l’autorité s’impose au citoyen-libre, de la même façon que les dieux s’imposent à l’homme (grec). Ceux sont les lois qui régissent  ce cadre, et elles ont valeurs d’absolu.

[6] Quiproquo. Disk1 p67

[7] Allemands :  all men = tous les hommes.

    

Catalogue doc du cmlo
Faites votre propre recherche !
buy movies
Compte rendu MOTI 8
Copyright 2004-2022 CMLO